FORTIS, les politiciens et les vaches (II) ou Dexia, l’Etat et Saint-Nicolas

By | 30 septembre 2008

Voilà, Saint-Nicolas est en avance.

Lundi,  c’était pour FORTIS (voir ici).

Mardi, c’est pour Dexia.

Non, non, il n’y en aura pas d’autres demain. Tout va bien, bonnes gens.

L’Etat continue à distribuer de l’argent qu’il n’a pas à des banques qui ne l’ont plus ou plus exactement qui en ont perdu tellement qu’elles ne peuvent plus prêter grand chose ni aux particuliers ni aux petites, moyennes voire aux grandes entreprises alors qu’elles disposent des placements des épargnants.

Trop compliqué?

Je recommence.

COMPRENDRE

De manière simplifiée, cela donne ceci.

Dans la banque de détail et dans la banque commerciale, les épargnants y déposent leurs économies contre rémunération.
La banque prête ces économies aux particuliers et aux entreprises également contre rémunération.

La différence des deux rémunérations constitue celle de la banque. Cela s’appelle la marge d’intermédiation.

MAIS, car il y a un mais, pour pouvoir prêter cet argent, la banque doit avoir des capitaux propres (Fonds propres) à hauteur de 8%. En conséquence,  chaque fois que la banque prête 100 €, elle doit avoir des capitaux de 8 € (cela s’appelle le ratio COOK ou ratio dit de solvabilité).

Donc, si une banque dispose de 1000.000.000 € de fonds propres, elle peut prêter 12.500.000.000 € provenant des dépôts de ses clients et/ou épargnants.

Ces règles sont régies par des accords internationaux approuvés (le plus souvent sans débat) par les parlements nationaux (Accords dits de Bâle: I, II).

Bonnes, ces règles?

Bien sûr, dès lors que la banque exerce son ou ses métiers dans le périmètre pour lequel les règles sont construites.

Mais? Oui, il y a un deuxième mais.

Les capitalistes de la finance (fonds de pension, col blanc des places boursières, Top managers des banques d’affaires) la plupart déconnectés de la vie réelle ont considéré que la marge d’intermédiation n’était plus suffisante. Ils lui ont préféré au fil des deux dernières décennies les commissionnements sur affaires, la tarification de tous les frais possibles (et imaginables) et surtout les plus-values sur titres et/ou opérations réelles (et depuis peu déconnectées du réel dont les produits financiers dits “dérivés”). Particulièrement, depuis la suppression des dates-valeurs.

Allez voir dans les bilans des banques pour les dernières années et vous constaterez que les revenus de toutes ces opérations sont devenus supérieurs aux revenus historiques basés sur la marge d’intermédiation et de l’économie réelle.

La banque se lance alors dans des opérations qui n’ont plus rien à voir avec ce périmètre défini dans les accords internationaux et dès lors qu’elle perd de l’argent, ses fonds propres diminuent et elle ne peut plus prêter à ceux qui en ont véritablement besoin  …. afin de faire tourner l’économie réelle.

De quelles opérations parle-t-on?

La spéculation hors de son marché, l’achat de titres d’autres banques sur la foi d’agences de cotation ou d’organismes de contrôle défaillants, l’achat de titres sans maîtrise de risque (genre les fameuses subprime (pour comprendre *) vendues dans du papier cadeau parfumé alors qu’à l’intérieur, cela fermente odeurs incluses) .

Qu’est-ce que l’économie réelle dans notre monde? C’est principalement consommer, produire, investir et surtout innover. Pas vraiment spéculer; en plus avec l’argent des autres.

S’INTERROGER

La question que j’ai posée lundi est de savoir si c’est à l’Etat de résoudre ce problème et si oui surtout de quelle manière?

Faut-il engager l’argent des contribuables d’aujourd’hui et de demain? Surtout après avoir vendu la plupart des banques publiques dont la CGER à FORTIS.

Pourquoi ne pas avoir vendu à BNP? Pour garder des centres de décision en Belgique?

On a bien laissé filer les centres de décision de la Société Générale, d’Electrabel, de Tractebel, de la BBL.

Non, tu te trompes citoyen. Cela, c’était des sociétés saines et très rentables.  

Dans le cadre de FORTIS, pourquoi  n’avoir prévu que 49% de chaque filiale et pas le contrôle (soit 51%) à tout le moins pendant un certains temps?

Qui a décidé réellement cela et quelles en seront les conséquences pour les uns et pour les autres?

Et il y a bien d’autres questions.

Dans un commentaire sur le billet de lundi, j’ai appris qu’il faudrait se taire.

Se taire quand les banquiers font leurs opérations de manière éminemment légère. D’autant plus, qu’ils les font dans le silence.
Se taire quand l’Etat tente de les sauver. Qu’est-ce que cela veut bien dire?
Et se taire après, parce qu’il est trop tard.

Démocratie, liberté d’expression … Constitution. Que des mots?

Alors voilà, je continue à me poser des questions.

D’où va venir l’argent que l’Etat (les Etats) va (vont) investir?

Fortis et Dexia vont-ils leur prêter leurs excédents de dépôt afin de renflouer leurs fonds propres? Si oui, est-ce orthodoxe?

L’Etat va-t-il disposer de mandats dans les conseils d’administration et autres organes de ces banques sous perfusions publiques? Si oui, quels copains (et copines) bien entendu tous et toutes compétent(e)s va-t-on désigner?

Quelle sera la responsabilité, l’évaluation de la mission et la rémunération y associées?

Mes amies, Marie et Chantal, me disaient aussi en parlant de l’existence d’un fond de compensation pour les épargnants:

“De combien d’argent est doté ce fond?
Où se trouve placé cet argent? Dans quel(le)s institutions financière(s)?”

Quel a été le rôle des intermédiaires financiers (dont les courtiers)? En quelque sorte, les intermédiaires des intermédiaires. On a vu – aux USA – des courtiers devenus milliardaires en dollars grâce aux subprimes. Et chez nous?

Il y a aussi la crise de l’énergie.

Il y a aussi la guerre du golfe qu’il faudra payer.  J’y reviendrai.

NE PAS OUBLIER

En avril 2008, on se demandait déjà si l’abcès des subprimes était vidé (Le quotidien Le Soir des 5 et 6 avril 2008).

Dans un billet paru sur le blog Ploutopia** vous trouverez un bon aperçu de cette crise.

Et la Société Générale à Paris au sein de laquelle un type tout seul a fait perdre à sa banque 5 milliards d’€. Un type?
Allez, on n’est pas chiche, 2 types. Et la direction est toujours en place …

Début août, les dirigeants de FORTIS ont refusé à leurs actionnaires une assemblée générale extra-ordinaire.
Quand les organes de gestion ne fonctionnent plus, la fin du régime est assurée.

Il y a quelque mois, la déclaration de Monsieur Yves Mersch (Président de la Banque Centrale du Luxembourg et à ce titre membre de conseil des Gouverneurs de la Banque Centrale Européenne), déclaration selon laquelle les effets sur l’économie européenne de la crise des crédits immobiliers à risque aux USA seraient “marginaux”. Il est vrai qu’aux extrêmes, tout est marginal (POUIC ou BOUM). Tiens, il est encore en place ce Monsieur?

CE QUI M’INTERPELLE LE PLUS AUJOURD’HUI

Je retiens deux groupes de questions.

I. Il paraît qu’il faut sauver FORTIS parce qu’elle représente une trop grosse partie de l’épargne belge (30%) ainsi que des crédits et assurances.

Pourquoi a-t-on laissé se créer un tel acteur?

L’objectif naturel d’une entreprise est d’être le plus vite possible en situation monopolistique ou oligopolistique avec quelques autres.
En clair, cela signifie que – dans notre monde – le but naturel de l’entreprise est de tenter de conquérir le marché (les consommateurs) afin de pouvoir imposer notamment produits et prix.
En outre, comme l’a déclaré le 19 janvier 2008, à l’hebdomadaire la LIBRE ENTREPRISE, Monsieur E. De KEULENEER “les gens d’affaires n’ont pas pour vocation à se préoccuper de l’intérêt général”.

Qu’ont donc fait les autorités de régulation de la concurrence? Leurs missions sont-elles adéquates? Ont-elles les moyens de leurs missions?

Qu’ont fait les “gendarmes” des marchés (Commission bancaire et financière, …)?

Monsieur André COOLS, Ministre d’Etat socialiste, avait l’habitude en parlant des banquiers de dire “qu’ils vous prêtent un parapluie quand il fait beau et vous l’enlèvent quand il pleut”.

Et voilà qu’il pleut et que l’orage gronde (chômage en hausse, perte de pouvoir d’achat, perte continue de confiance dans les dirigeants, …).
Et l’on va donner un parapluie à ceux qui ont été “chanter au soleil”, qui peuvent le plus souvent d’ailleurs continuer sans souci quotidien.

Il paraît que si on ne fait pas cela, ce serait encore plus grave …

Tiens, pour l’instant le parlement des USA en a décidé autrement.

II. Y-a-t-il d’autres solutions pour régler cette crise?

Le politique est-il obligé d’engager l’argent des contribuables et de plus sans leur demander leur avis?

Au fait, savent-ils imaginer autre chose que d’engager l’argent qui n’est pas le leur?

“Les gens qui ne manipulent que le marteau posent tous les problèmes en termes de clous”.

Doit-on continuer à considérer les citoyens comme des vaches à traire?

Je ne le pense pas et c’est pour cela que j’ai écrit lundi que les vaches n’étaient pas d’accord.
Elles ne le sont pas mais ne savent pas comment le faire savoir ou bien elles ont peur de l’exprimer.

Je propose que l’Etat lance une souscription publique afin de revendre de suite les participations qu’il s’apprête à prendre (en notre nom mais sans notre accord) dans les deux Grandes Banques.

Je propose que ces participations soient gérées conjointement par des banquiers, par l’Etat et par des représentants des citoyens-investisseurs.

Je ne pose pas la question de la morale dans tout cela mais elle me tarabuste.

* Avec le temps, certains liens ne sont plus disponibles, désolé !
** http://ploutopia.over-blog.com/article-21756859.html

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